“La priorisation des projets, c’est une tâche “insoluble”, qui n’a pas solution miracle à proprement parler. Toutefois, ça ne veut pas dire qu’on ne peut pas essayer de chercher quelque chose qui peut convenir. Je peux même me permettre de dire que c’est ça la solution : c’est de tenter de trouver une solution.”
Un des enjeux auxquels sont soumis les DSI concerne la priorisation des projets qu’ils souhaitent mettre en place. Dans ce podcast, Sylvain Bourdette revient sur la méthode qu’il utilise, en collaboration avec les directions métiers, afin de gérer son portefeuille projet et classer ces projets en fonction de leur priorité pour les business units.
Sylvain Bourdette a une vingtaine d’années d’expérience dans le monde de l’IT. Initialement formé en tant que développeur, il a été DSI pendant une dizaine d’années dans le domaine des télécommunications, notamment chez SFR et Numéricâble. Actuellement, il est le DSI Group d’Indexia, une entreprise spécialisée dans la distribution d’assurances affinitaires.
I) Le rôle des directions métiers dans la priorisation des projets IT. Pour Sylvain Bourdette, prioriser les projets passe par une relation sans faille entre la DSI et les directions métiers. Ces dernières prennent le lead tandis que le DSI les accompagne dans la transition.
II) Quelle méthodologie pour définir une roadmap claire et précise ? Afin de concevoir une roadmap précise en fonction des informations fournies par les métiers, Sylvain Bourdette utilise une méthode basée sur la capacité d’action globale de ses équipes plutôt que sur un capacity planning micro.
III) Faire face aux difficultés macroscopiques qui enrayent la priorisation. Relation métiers/DSI/direction générale, demande d’une enveloppe budget plus conséquente, limites de sa méthodologie de priorisation, vision (trop ?) centrée sur le ROI, Sylvain Bourdette conclut ce podcast en faisant référence aux difficultés auxquelles il est confronté.
Selon Sylvain Bourdette, une DSI a pour objectif de réussir à compiler l’ensemble des besoins métiers en fonction des capacités et du budget déjà défini et non modulable. De plus en plus, les DSI doivent composer avec une difficulté supplémentaire : travailler avec un budget fixe annuel et avec des besoins métiers qui sont beaucoup plus nombreux qu’auparavant. Tout l’enjeu est de réussir à prioriser les bons sujets (ceux qui ont du sens et qui apporteront de la valeur) pour les affilier aux bonnes directions métiers, tout en conservant une relation de confiance avec les business units.
En avance de phase, puisque le projet est porté par un binôme, c’est le métier qui dicte sa cadence. Il va notifier à la DSI le temps qu’il a pour la réalisation d’un projet et va ensuite, déterminer de lui-même, les capacités qu’il possède afin de réaliser (ou non) ledit projet. Pour Sylvain Bourdette, ce n’est pas à la DSI, au niveau macro, d’affirmer ou d’infirmer les capacités du métier.
En parallèle à ça, puisqu’il veut avoir une visibilité claire sur deux mois, il met en place une ou plusieurs réunions avec les métiers toutes les deux semaines. Il ne réunit pas forcément l’ensemble des directeurs métiers (pour éviter d’évoquer des sujets différents avec des directions qui ne sont pas concernés) et a donc constitué des groupes de métiers : commerce/marketing, juridique/conformité, service client, finance, etc.
Une direction métier va automatiquement identifier les projets prioritaires pour lui, la DSI va donc essayer de savoir ses priorités et son ranking vis-à-vis des projets à venir. Selon ces préférences, la DSI va ensuite alerter le métier sur la potentielle durée de réalisation du projet. Sylvain Bourdette va également revenir sur le besoin exprimé par le métier afin de l’affiner.
Une fois qu’il a obtenu sa liste de priorité auprès de tous les métiers, il essaie de prendre en compte le projet prioritaire de chaque direction et il se lance dans un “tétris” afin de combiner tous les projets dans son capacitaire. Ainsi, lors de la réunion suivante, il peut afficher dès le début de la réunion, son capacitaire à venir en fonction de toutes les directions métiers. C’est comme cela qu’il peut faire comprendre aux métiers le temps qu’une DSI passe pour réaliser l’ensemble des projets prioritaires de toutes les directions.
Parfois, tout n’est pas rose et les projets prioritaires peuvent entrer en conflit et ne pas être inclus ensemble dans le capacitaire. C’est à ce moment-là que Sylvain Bourdette prend le temps de réunir les directions métiers concernées ou alors d’invoquer une décision de management qui vient d’une entité supérieure à la sienne.
Ayant déjà travaillé dans des contextes où il n’avait aucune visibilité, Sylvain Bourdette essaie de travailler avec une visibilité sur deux mois. Au sein de ses différentes équipes de développement ou chez ses fournisseurs, il définit une capacité à réaliser : il s’agit du nombre de jours-homme de développement par mois, en fonction du nombre de collaborateurs ou de consultants. Ensuite, avec sa liste de projets priorisés par les métiers, il associe, en fonction des priorités métiers, les projets en fonction de ses capacités en interne.
Plutôt que de mettre en place une roadmap en fonction des compétences, il préfère la mettre en place en fonction de la structure équipe qu’il a conçue et en fonction des tâches à réaliser. Pour lui, cela permet de réagir et de prévoir l’imprévisible : si une ressource n’est pas disponible (pour une raison ou une autre), cela permet de remplacer les compétences de ce collaborateur par une autre ressource d’une même équipe.
Selon Sylvain Bourdette, la mise en place d’une méthodologie comme celle du tableur excel et du time tracking viendrait de la peur de se tromper et d’être en retard vis-à-vis des délais fixés. Il considère qu’être en retard n’est pas quelque chose de grave à partir du moment où l’on sent que les équipes se donnent à fond pour le projet. Pour lui, il vaut mieux être en retard car la gestion n’a pas été parfaite, qu’être à l’heure avec un rendu projet approximatif. Il revient alors sur la relation avec les métiers : la création d’un lien fort avec les métiers permet d’avoir une indulgence de leur part vis-à-vis des délais de livraison.
Tout d’abord, il évoque les difficultés qui peuvent exister quand une partie des équipes sont des prestataires ou lorsqu’il doit travailler pour des clients externes. Si certains fournisseurs peuvent fonctionner en mode capacitaire (ce qui ne change rien à sa manière de travailler), d’autres exploitent le time tracking.
Sur les outils où il n’y a pas forcément besoin de faire du développement mais plutôt du paramétrage, il est plus compliqué d’exploiter la méthode capacitaire. Il est plus compliqué de chiffrer la customisation d’un ERP. Dans ce genre de situation, il gère en mettant en place de petits cycles en V. Lorsqu’il met en place des développements externalisés en mode “forfait” avec un fournisseur, il est quasiment impossible de mettre en place la méthode capacitaire.
Ensuite, il évoque la relation entre la DSI, les métiers et la direction générale. Pour Sylvain Bourdette, il est important de prendre en compte que près de 60 % du travail réalisé au quotidien ne sont pas prévus (ou fait pour être) dans une roadmap, tout simplement car ce sont des tâches qui ne sont pas anticipables. Il met un point d’honneur à avoir une discussion avec la direction générale afin d’expliquer cette méthodologie “capacitaire”. Pour lui, il faut mieux ajuster le budget pour allouer des ressources sur des pôles de compétences où les enjeux sont les plus importants.
Dans tous les cas, il considère que si une entreprise n’est pas dans une optique de refonte du SI ou dans un lancement de produit récurrent, il est très complexe de mettre en place une roadmap correcte. Pour ce qui est du budget, deux possibilités : soit le sujet a été anticipé et une enveloppe financière a été dédiée à la réalisation du projet, soit il faut que la DSI en accord avec le métier, monte un dossier pour convaincre la direction d’allouer des fonds pour le projet.
Pour prioriser les projets, Sylvain Bourdette se focalise énormément sur la relation qu’il entretient avec les directions métiers. C’est d’ailleurs l’un des axes qu’il exploite pour que les métiers puissent ensemble, faire passer un message général à la direction générale afin que l’entreprise se transforme. En faisant des points bimestriels avec les métiers, cela permet aux directions et à la DSI d’analyser les besoins, de présenter les futurs projets qui seront mis en place, et d'offrir au métier, la possibilité de classer ces projets en fonction de leur priorité.
Après avoir établi ce ranking, Sylvain Bourdette prend le temps, en fonction de la capacité de ses équipes, d’emboîter l’ensemble des projets prioritaires. Ainsi, il peut présenter la roadmap des projets à venir aux directions métiers afin qu’ils puissent également se projeter. Si un métier souhaite obtenir une solution externe, Sylvain Bourdette considère que c’est à elle de prendre le temps de convaincre la direction générale de lui allouer un budget pour inclure cet outil. La DSI n’étant que l’entité qui va intégrer la solution dans le SI de l’entreprise pour que le métier puisse l’utiliser.
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